Chat Bleu : avril 2022 -1)

Les livres étaient, cette fois, accompagnés d’un Côte du Rhône en vieilles vignes fort bon.
– Grande couronne  de Salomé Kiner, éditions Christian Bourgois, 2021.
Libération avait publié les premières pages de ce premier roman en septembre et elles fonctionnaient. Le ton est plein d’humour. Le personnage, une adolescente de banlieue, dans les années 90, raconte ses envies de marques, ce que cela l’amène à faire, ce que vivent aussi sa famille et ses amies. C’est percutant et drôle même quand ça pourrait être dur ou sordide.
– Dernière station avant l’autoroute d’Hugues Pagan, 1997, Rivages noir. Prix Mystère de la Critique 1998.  A l’occasion de la sortie de son dernier roman, La carré des indigents, on trouve réimprimés certains de ses textes précédents. Son personnage, flic de la nuit, est fatigué, sans illusions, quasi fini, limite cliché. Mais la langue est belle et décrit bien et le parcours de  ce « lonesome cowboy »,et l’état de la police, de ses locaux, matériels et agents.
– Un essai de Georges Didi-Huberman : Le témoin jusqu’au bout, éditions de Minuit, 2022, évoque le philologue juif Victor Klemperer (1881-1960), l’auteur de la L T I  – Langue du IIIème Reich, paru en 1947 et d’un Journal clandestin tenu de 1933 à 1945, publié en Allemagne en 1995. Ces  textes analysent  la langue, son évolution sous le totalitarisme.  Ce qu’elle dit, comment elle le dit et combien peu de gens se rendent compte de sa violence, de ses transformations et de leur impact.
Et on peut, sans problème, faire le parallèle avec d’autres langues, dans d’autres pays, à d’autres moments : la langue du management dans nos sociétés – voir Sandra Lucbert : Personne ne sort les fusils, Seuil, 2021 – ou celle d’un pays actuellement agresseur par exemple .

La suite de la soirée  bientôt.
Le prochain Chat Bleu est prévu le 12 mai.

Chat Bleu : mars 2022 – 2)

On a ensuite évoqué des grandes fresques, des sagas, des gros livres qui nous plongent dans d’autres lieux, d’autres milieux, d’autres époques. Quelqu’un a commencé et les titres sont venus les uns après les autres : plaisirs d’histoires dépaysantes, au long cours, qui nous empoignent :
– Les Dukay de Lajos Zilahy, traduit du hongrois par Pierre Singer, Folio : se passe dans l’empire austro-hongrois, de 1919 à 1940.
– saga des Cazalet d’Elizabeth Jane Howard, traduction d’Anouk Neuhoff, Folio. 4 tomes existent en français, un 5è n’est pas encore traduit : de la première à la deuxième guerre mondiale, une grande famille d’industriels anglais.
– La garde blanche de Mikhaïl Boulgakov , traduit par Claude Ligny, éd Robert Laffont, Papillons poche : fin 1918, l’Ukraine devient le refuge des Russes blancs. C’est écrit en 1923-24. Staline adorait (parait-il).
Le grand monde de Pierre Lemaitre : son dernier : une famille opulente à Beyrouth dans les années 50 doit s’exiler. On peut de plus en plus le comparer à Alexandre Dumas. En plus politique.
– Les hommes de Laurent Mauvignier, éd Minuit. Livre moins épais mais parlant à travers un homme, dans un village français, après, de l’histoire de la guerre d’Algérie.
– Le clan des Otori, de Lian Hearn, traduit par Philippe Giraudon, éditions Picquier : , aventures au Moyen-âge, au Japon
– La pierre et le sabre d’Eiji Yoshikawa, traduit par Léo Dilé, éd . Picquier : Cape et épée dans le Japon du XVII ème siècle.

– On a reparlé du Goncourt 2022 : La plus secrète mémoire des hommes de Mohamed Mbougar Sarr, éditions Philippe Rey / Jimsaan : « ambitieux, intelligent. » « Une réflexion sur ce qu’est écrire. Une tentative de mêler des mondes : on passe d’Afrique à Paris et Buenos Aires. » « Une belle partie finale et des personnages féminins magnifiques. »
et quelques livres très récents :
– Seyvoz de Maylis de Kerangal et Joy Sorman aux éditions Inculte. Livre à deux voix sur le barrage de Tignes. Deux écritures de couleurs différentes, au sens propre et au sens figuré.
La décision de Karine Tuil, chez Gallimard : histoire de juges antiterroristes. « une écriture efficace »

Enfin, un livre d’art : L’arrivée du printemps- Normandie 2020, éd Royal Academy, peintures de David Hockney, préface de William Boyd. Fait sur iPad, envoyé sur iPhone au moment du confinement.

Rendez-vous jeudi 28 avril, 18h au Chat Bleu

ça bouquine ? 3)

Mis en avant

 

La troisième émission du podcast Ça bouquine ? est sortie : elle aborde la transmission du goût de la lecture. Vous pourrez choisir une plateforme d’écoute en cliquant sur ce lien : https://linktr.ee/cabouquine .

C’est trouvable sur Youtube. C’est fait par un groupe d’étudiantes et c’était très sympathique d’enregistrer avec elles.

Et on y est avec le Chat Bleu et nos séances un vin, des livres,
et avec « ça va? ça va... », le petit dernier de Rue du Départ, né d’un atelier d’écriture. Bientôt avant-dernier : on travaille à Bout portant: de Pascal Millet 

Femmes du monde : Ukraine

Pris dans Slate : 31-03-2022 :

« Plus de 10 millions d’Ukrainiens ont été déplacés depuis le début de l’invasion russe, dont 3,5 millions qui ont quitté le pays. Il s’agit principalement de femmes et d’enfants –les hommes devant rester combattre– et constituent des cibles idéales pour les trafiquants d’êtres humains. La BBC s’est rendue à la frontière polonaise pour enquêter sur le sujet.

«Pour les prédateurs et les les trafiquants, la guerre n’est pas une tragédie», considère le secrétaire général des Nations unies, António Guterres. Au contraire, c’est une «opportunité». En Ukraine et dans les pays alentour, ces réseaux de trafic sexuel sont déjà particulièrement actifs en temps de paix, mais la guerre les renforce encore.

Selon Karolina Wierzbińska, coordinatrice de l’ONG Homo Faber, le plus préoccupant est le sort des enfants: beaucoup fuient l’Ukraine sans être accompagnés. À la frontière polonaise, notamment, beaucoup d’entre eux ont été signalés disparus.

Margherita Husmanov est une réfugiée ukrainienne de 20 ans ayant quitté Kiev il y a deux semaines. Elle a décidé de rester à la frontière pour empêcher les nouveaux arrivants de tomber entre de mauvaises mains. Elle témoigne: «Le premier jour, on a vu trois hommes italiens qui cherchaient des femmes à vendre pour le trafic sexuel.» Margherita a alors appelé la police, qui a confirmé ses soupçons.

Une autre réfugiée, Elena Moskvitina, a raconté son expérience sur les réseaux sociaux, pour mettre en garde contre ce danger. À son arrivée à la frontière roumaine, de faux bénévoles l’ont convaincue que la Suisse était la meilleure destination pour elle et qu’ils la conduiraient jusque là-bas. Ils l’ont invitée à monter dans un van avec d’autres femmes, son fils et sa fille. Suspicieuse, elle leur a demandé leur carte d’identité et cette requête les a mis en colère. Heureusement, elle a réussi à s’enfuir avant que le van ne parte.

Des initiatives pour lutter contre le trafic sexuel

Elżbieta Jarmulska a fondé Women Take the Wheel, pour venir en aide aux réfugiées ukrainiennes. «Ces femmes ont déjà tant subi en fuyant les combats, et quand elles arrivent elles sont exposées à l’exploitation et à la peur? Je n’ai pas les mots.» Son initiative a rassemblé 650 femmes polonaises qui font des trajets à la frontière pour offrir un passage sécurisé aux réfugiés.

Nadia, l’une des passagères d’un trajet offert par Elżbieta, explique qu’elle est rassurée d’être conduite par une femme. Et pour cause: elle a entendu parler à la radio ukrainienne des risques d’exploitation. Si le problème est donc connu des autorités, le processus de filtrage de ceux qui prétendent aider les réfugiés est encore loin d’être infaillible, et le crime organisé (trafic sexuel, trafic d’organes et travail forcé) est bien présent. »