Chat bleu de décembre

En dégustant ou un Bordeaux rouge, montagne Saint Emilion 2013 ou un Gewurtztraminer vendanges tardives d’un petit producteur récompensé comme le meilleur de France – moelleux, ample en bouche, à goût de fruit confit, parfait pour les petites tapas spécial Noël qui l’accompagnaient – nous avons évoqué :
– la plaquette d’Eric Bonnargent : Lettre ouverte à ma bibliothèque, chez Réalgar : une déclaration d’amour aux livres, un petit inventaire vivant de ceux qui comptent pour le personnage nonagénaire /auteur trentenaire, professeur de philosophie.
Manuel d’exil de Vélibor Colic, chez Folio depuis peu : roman vrai de celui qui vient en France avec son bac + 5, sa culture, son (court) passé d’écrivain et se retrouve dans un foyer avec d’autres migrants, son envie d’écrire, de s’en sortir. Humour : (p. 11) « J’ai 28 ans et j’arrive à Rennes avec pour tout bagage trois mots de français – Jean, Paul et Sartre. » Désespoir : (p. 21) «  Le nouveau monde autour de moi est anguleux et dangereux. Je le vois comme un gigantesque flipper. Je me cogne tout le temps, partout où je passe » (…) Je suis mal adapté »… Soulagement :  … » invité et sauvé par le Parlement des Ecrivains ». Humour encore :quand  il mange de plus en plus, grossit de plus en plus, se sent (p. 179) « un vrai Yougo dur à cuire » qui, avec les mêmes désirs,… ne séduit plus… ou alors….
– Bondrée de Andrée A. Michaud, Rivages poche : un polar du Québec qui se passe au bord d’un lac, à la frontière entre USA et Canada, pendant des vacances dans les années 60. Des québécismes, des américanismes. Le besoin d’un traducteur pour l’inspecteur francophone. Une belle langue aussi au moment de la mort des jeunes filles.

Et aussi, en romans  :
– Ecoutez nos défaites de Laurent Gaudé, Actes Sud qui se passe sur trois époques, auprès de trois chefs de guerre. Mélancolique.
– Ma reine de Jean-Baptiste Andréa, éditions l’Iconoclaste : « belle naïveté » ou « fausse fraîcheur » ? Un premier livre qui a reçu des prix.
– Trouvé dans une jolie librairie à Florac : Le reste est silence de Carla Guelfenbein, Babel. Au Chili, la découverte de secrets de famille.
– Chanson douce de Leïla Slimani ( Gallimard 2017) : une écriture directe et concise.
– Cette chose étrange en moi d’Orhan Pamuk, ( Gallimard 2017) qui s’écoule sur des décennies, dans des quartiers d’Istanbul.
– Les fantômes du vieux pays de l’ Américain Nathan Hill, énorme premier roman ( Gallimard 2017).
– Article 353 du code pénal de Tanguy Viel, Minuit, 2017
En polars :
– les livres de Franck Bouysse à la Manufacture de livres, d’ Edouard Abbey chez Gallmeister, du Finlandais Anti Tuomainen, trois traduits aux éditions Fleuve.
En essais ou documents :
– Gabriële, biographie de la première femme de Picabia, par ses arrière-petites-filles Claire et Anne Berest, ed. Stock, 2017
– Cherubini de Marc Vignal, éditions Bleu nuit 2017
Des hommes qui lisent d’Edouard Philippe, chez J.C.Lattès, 2017.
– Lire Lolita à Téhéran d’Azar Nafisi, en 10-18, (toujours intéressant quand, aux informations, on vient d’entendre que plus de 200 jeunes viennent d’être arrêtés pour avoir fait une fête ensemble, hommes et femmes mélangés).

Décidément, les femmes lisent beaucoup !
Des livres récents ! de maisons d’éditions « dominantes »… !

drôle de cadeau !

A un jeune, Arthur, qui veut – peut-être – faire des études d’histoire…
une Pièce Unique à partir de Les derniers jours du Fort de Vaux du capitaine Henri Bordeaux, paru en 1934 aux éditions Nelson. Une ode à la guerre, au sang versé pour quelques mètres pris, repris, re-repris. Un « que la mort est jolie » pour sa patrie…

A mettre en parallèle avec des livres édités en l’honneur du centenaire comme  L’enfer de Verdun de Félicien Champsaur, (2015, éditions Le Vampire Actif, installées à Saint-Etienne) qui montre l’horreur de ces combats et ne remet pas non plus en cause la justesse du carnage.

Voilà quelques « poèmes express » nés du H. Bordeaux :
La cadence dépouille un mort, le soulève, le débouche et l’écrase.
– Un fracas rouge s’allonge tandis que la vallée s’emplit d’une vapeur opaque.
– Le coeur battant, les camarades écoutent : silence, un caillou a roulé.
– Recommencer la journée, choisir et poser la main sur une poitrine.
– Les hommes remontent la pente et se jettent dans du vin.
– Quelques heures plus tard, lavé, nourri, apparaît un cas grave,un fils unique.

Chat Bleu : les prochains

Bon, promis, on vous raconte vite ce qu’on a dit le 7 décembre…

Mais déjà, voilà les prochaines dates de Chat Bleu :

les jeudis, à partir de 18 h15 :
– 1er février (ben oui, on s’est dit qu’entre la rentrée tardive et le Goût des Autres, il fallait vous laisser tranquilles en janvier)
– 22 mars
– 12 avril
– 17 mai
– 7 juin.
(Là, on vous étonne hein, pour une fois, on voit loin…! )

N° 47 à Allia

La Pièce Unique n° 47 a été faîte à partir de Contre Télérama d’Eric Chauvier, publié aux éditions Allia en 2011. Eric Chauvier, né en 1971, a principalement publié chez cet éditeur. De lui, nous avions aimé :
Anthropologie en 2006 : entre « récit » et « étude sociologique » sur une jeune Rom ,
Que du bonheur en 2009 sur cette expression sans pensée.

Contre Télérama part, lui, du mépris de cet hebdo pour la « vie périurbaine » et fonctionne par mots clefs – le premier étant «  clefs » justement – qui entraînent une petite histoire ou une réflexion.

Les livres d’Allia sont très divers : textes anciens méconnus, récits, documents, essais ; très beaux, papier crème, , couverture douce à la main et avec rabat, petit format, plutôt plaquettes souvent. Etonnants aussi : ils n’aident pas vraiment le lecteur par leur quatrième de couverture (celle de Contre Télérama… :  » Y’en a vraiment qui sont jamais contents. »…). Contre-exemple, notre dernier achat : de Bill Cardoso : KO à la 8e reprise : sa quatrième reprend une page entière du livre.
Chez Allia, nous avons beaucoup aimé par exemple ce Bégout sur Las Vegas, Le bateau usine de Takiji Kobayashi ou Interrogatoires de Dashiell Hammet.
C’est à eux qu’on va (r)envoyer le Chauvier.

Exemples de Poèmes express venus de Contre Télérama :
– Entendu une histoire, en plein hypermarché, une nuit.
– Un tramway sortant d’un bois, marronniers extasiés.
– Bars d’échanges de souffle.
– Les pavillons sont poussière d’intimité.
– Notre fatigue n’arrête rien. Nous avons accès au gris et ne connaissons pas de fiction.
– Au milieu du 
patatoïde, quelqu’un apparaît : contours et métaphysique.