L’homme invisible : P U n° 56

L’homme invisible d’H.G Wells (1866-1946) est paru en Angleterre en 1897 et en France, pour la première fois, en 1901 : Griffin, un scientifique entièrement dans sa recherche, devient un criminel : il vole son propre père, incendie un appartement, blesse des personnes. Le savant fou, prisonnier de son invisibilité mais dans la toute puissance, est sorti de l’ordre moral et en meurt.
Wells, s’il juge son personnage, s’amuse bien aussi.

Quelques « poèmes express » qui en sont issus :
Le scaphandrier se tourna pour porter le tuyau à ses lèvres.
– Explosion d’un air digne ; il n’y a rien dedans.
– Orteil et poing, j’ai l’intention de vous trahir.
– Cela se passa dans un cri puis on rangea.
– Il se leva et, l’air d’un imbécile, enfla.
– A deux mains, comprendre la sensation d’ouate.
– Il tira au hasard : la bouche éclata, langue sur les lèvres.

La P.U. n° 56 est offerte à Catherine D., professeur en retraite, femme ouverte, rencontrée lors de la première GAP (Grande Académie de Printemps) du festival seinomarin Terres de Paroles en 2017. Nous y avons partagé ateliers, lectures et spectacles.

Terres de paroles 2018

Le festival Terres de paroles se pose dans 25 communes de Seine Maritime avec plus de 150 événements du 27 mars au 29 avril 2018.

Il a eu lieu au Havre toute cette semaine :
– au théâtre des Bains Douches avec la création de J’appelle mes frères, du romancier et dramaturge suédo-tunisien Jonas Hassen Khemiri. Mise en scène de Ludovic Pacot-Grivel avec quatre excellents comédiens dont Nadir Louatib.
– au Tétris, avec une lecture musicale à partir de Zones de divergence, dystopie de l’Américain John Feffer, avec le comédien Jean-Damien Barbin -une voix à tomber, de l’humour – et le compositeur Jean-Paul Buisson,
– à la Halle, lecture théâtrale de Marbourg de l’auteur catalan Guillem Clua,
et last but not least :
Sopro de Tiago Rodrigues / Teatro Nacional D. Maria II, au Tetris : pièce en portugais, écrite autour d’une souffleuse qui, cette fois, est sur scène : Cristina Vidal. Déclaration d’amour au théâtre, collage de souvenirs, mise en abîme. On sourit, on a les larmes aux yeux.

Comme l’an dernier, des grands moments de théâtre mais dans la proximité et la simplicité et des rencontres avec les auteurs hyper-intéressantes – et j’insiste, simples.- : ainsi, l’entrevue de Khemiri, dans un français parfait, avec les étudiants des métiers du livre à l’IUT jeudi matin !

55 : Jack London

P.U. n° 55 : L’invasion sans pareille, nouvelle de Jack London (1876-1916) parue en revue en 1910, publiée aux éditions du Sonneur en 2016, préfacée et traduite par Thierry Beauchamp.

Un récit dystopique : la Chine des années 1970-80 surpeuplée fait peur au monde et on lui envoie des avions qui déversent des tubes de verre fin qui éclataient en mille fragments dans les rues et sur les toits. (p 48)… L’Occident tue les Chinois par une vingtaine d’épidémies (p 50)…

Cela ne nous rappelle rien ? : les expériences japonaises de l’Unité 731, créée en 1932-33, activées pendant la seconde guerre mondiale ou les frappes chimiques de la Syrie en 2018…
London a – en 1910 ! – vu juste sur
– l’utilisation d’armes inhumaines – si tant est qu’il y en ait d’humaines –
et
– la démographie chinoise.

La P.U. n°55, 3 livres en 1, est offerte à Jean-François T., grand « écrivant », défenseur des mots dans un collectif de frappadingues à tendance oulipienne qui pratiquent régulièrement l’écriture par la contrainte.

Quelques exemples de Poèmes Express :
– Les Chinois faisaient les Chinois, comprenaient les Chinois et l’esprit chinois.
– Grandir calmement. Et l’inquiétude cesse.
– Rien fut déjà beaucoup trop ; c’est tout.
– A peine la moitié de la vérité était possible. Et l’on n’y pouvait rien.
– Sous le regard des moustiques, de grands avions pourrissaient, empilés.

P. U. n° 54 : de Wiesel

Pièce unique n° 54 d’après Le crépuscule, au loin d’Elie Wiesel (1928-2016), publié en 1987, un an après son prix Nobel de la Paix.

Un livre dans lequel je ne suis pas vraiment entrée, pas en tous cas comme j’avais pu le faire dans son premier texte : la nuit paru aux éditions de Minuit en 1958.

Cette difficulté, la gêne face au tragique du sujet de l’holocauste et ses suites et l’irrévérence inhérente à la forme des P.U. n’ont permis que peu de Poèmes Express (… acceptables… peut-être en est-il toujours ainsi mais cela semble plus frappant encore cette fois…)
Voilà :

J’ai manqué le sofa ; question de méthode sans doute.
– Un baiser qui dura des semaines, un jour, desserra son étreinte.
– Des frissons traversent le corps des femmes d’un certain âge. Consultons.
– Un être vidé regarde le vide pour ne pas tomber sur une idée.
– Autour des malades, les humains semblent plus réels, comme des tasses.
– Né en Pologne, il est venu rayer un Soviétique.

Pour ces différentes raisons, cette Pièce Unique s’auto-détruira après la publication de ce post.