Les Vivants – mars 2024 – 1)

On a bu, oui, forcément, mais Sébastien ne nous en a pas trop parlé et ensuite, on a oublié de le lui demander…
On avait lu, ça c’est sûr !

  • Cartographie d’un feu de Nathalie Démoulin, Denoël 2024 :
    il a déjà été le sujet d’ un post précédent, mais je voulais insister sur le côté extrêmement visuel du texte. Voilà un autre passage, p 75 : « Une poignée de chamois s’éparpillent sur une bande rocheuse au-dessus de la zone de feu, en un bref remous, chassés par une peur dont je ne perçois pas l’objet. D’ici on n’entend pas la ville. On n’entend que le vent. Il dévale des crêts, tourne sur la neige et trace de grandes vagues qui feulent. Le sang tape sur mes tympans. Alors je n’entends pas venir le zeppelin. Son ombre se referme d’un coup, éteignant les soleils sur la neige. Il est juste au-dessus de moi, énorme coque muette. Dans la nacelle de verre greffée au ballon, je distingue des silhouettes. (…) L’aérostat glisse en silence au-dessus de la cluse. Et je me demande si les passagers ont acquitté un supplément pour survoler l’incendie et détourner le zeppelin de son circuit habituel, ou bien si la compagnie a affrété un vol spécial. Vous pensez ! Un incendie si insensé ! Le dirigeable s’élève paresseusement vers Furieuse »…
    Incroyable, l’imposant de ce vaisseau !
  • Sans valeur de Gaëlle Obiégly, Bayard, 2023 : Habituellement éditée chez Verticales, on pouvait entendre il y a quelques jours sa voix d’enfant à France-Culture dans l’émission d’Arnaud Laporte. Voix d’enfant, point de départ du livre aussi – la narratrice ramasse un petit tas d’ordures abandonnées dans la rue –   mais pas les propos qu’il entraîne : la place des objets dans notre vie, leur côté caduque, l’histoire possible de la personne qui l’a déposé là, l’appropriation de cette histoire : « Les souvenirs d’une inconnue prennent la place des miens, disons qu’ils communiquent. » Il y a des photos ratées dans ce petit tas : « J’aime ces photographies plates qui laissent entendre démonstrativement qu’elles n’ont aucun besoin d’interlocuteur. C’est peut-être leur message. ». La référence à une collection new-yorkaise commencée par un éboueur, Molina : p 78-79 : «  La vie à New York, constate Warhol, encourage les gens à vouloir ce que personne ne veut – à vouloir les choses laissées pour compte. Pourquoi ça ? Parce qu’il y a énormément de gens à concurrencer. Alors pour obtenir quoi que ce soit, ton seul espoir, c’est de modifier ton goût, de manière à vouloir ce dont les autres ne veulent pas. Et Molina a développé ainsi son goût, comme, avant lui, les surréalistes. »
  • Histoire de l’homme qui ne voulait pas mourir de Catherine Lovey, Zoé, 2023 : une femme parle de son voisin, Sandor. On ne saura presque rien d’elle qui vient d’arriver dans une petite résidence, en Suisse (P. 23 : pays dans lequel nous vivons, dont le conservatisme replet m’horripilait autant qu’il l’enchantait, lui, le natif d’Europe centrale. » . Elle est plutôt militante écologiste, il a toujours l’idée que mettre son nom sur une pétition peut poser problème. Ils se voient assez souvent mais de manière détachée. La maladie commence pour Sandor et là, c’est ce que lui en dit, ce que les médecins en disent et ce que voit la narratrice chaque fois qu’elle l’aide. Le déni du malade, la technicité des spécialistes et la réalité. Le ton est un peu sec mais cela fonctionne et l’empathie se ressent.
    Bientôt un prochain post pour tous les autres livres évoqués.
    Le prochain rendez-vous chez Les Vivants est prévu le jeudi 18 avril

 

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