David Joy : donner des voix à des sans voix

Un long corps, une barbe rousse sous une casquette, David Joy est à la Galerne, au Havre. Il est arrivé de Caroline du Nord la veille. Il est en France pour un mois.
Il vit au coeur de la nature, « où il voit peu de gens mais beaucoup d’ours. » Il écrit sur cet endroit. « j’essaie d’écrire une histoire très humaine à l’endroit que je connais. Je viens de gens à qui on n’a jamais donné la parole. »

Le point de départ des livres dépend de chaque histoire : la première est née d’une image : celle d’un très jeune garçon qui se tient avec son père devant un sanglier. Le père veut qu’il le tue. Lui, ne le veut pas. Pour le dernier roman, je voulais écrire sut la suprématie blanche. Le pays est fondé sur la suprématie et ceux qui bénéficient de ce système, ne veulent pas l’admettre. Je voulais les y obliger. 
(…)  Le silence est de la complicité mais je ne pense pas que la littérature doive s’engager . Elle a à susciter une réponse émotionnelle (…) à mettre en lumière les aspects de la condition humaine. (…)
je voulais rendre le lecteur blanc mal à l’aise. (…)
Les deux visages du monde
est un roman noir parce que  » je suis influencé par des écrivains : Larry Brown, Ron Rash..
Ce roman vient d’une idée, Je suis fier d’être de Caroline depuis douze générations mais c’est très compliqué : ces gens ont eu des esclaves. C’est un endroit très puissant pour créer de la fiction. La fiction bénéficie énormément du conflit.
Mon père a grandi dans la pauvreté. Il est dur de regarder un homme comme ça et lui dire qu’il a vécu une vie de privilèges, mais c’est vrai, il n’a pas été arrêté par la police, a toujours eu un meilleur salaire que son collègue noir.
Les fins heureuses ne m’intéressent pas. Les Américains les aiment, n’ont pas envie d’être mal à l’aise.
C’est pour ça que mes livres sont plus appréciés en France qu’aux USA où on veut des livres d’aéroport. Les Français demandent plus de l’art.
J’ai tendance à écrire sur des personnes dos au mur. (…)

Chaque roman a été écrit différemment : le premier, la nuit, entre 22h et 4 h du matin. C’était une nécessité, j’avais deux métiers. Maintenant, je n’ai plus besoin de faire ça.. Je n’écris pas tous les jours mais j’ai confiance.(…)
Je n’avais jamais fait de plan  mais celui-là est différent, j’ai essayé de faire une histoire avec du mystère. Là, un plan est nécessaire.(…)
Oui, je détruis beaucoup : pour le 1er livre, j’ai brûlé 15 000 mots, pour le 2ème 30 000, pour le 3ème toute la première version… « I’m getting worse…(rire)
En
 ce moment, je travaille sur un livre à la première personne. Et je joue avec l’idée d’une fin heureuse ! »

Et David Joy finit par :« Les librairies indépendantes attirent de bonnes personnes. Ce sont des sanctuaires. Je vois comme vous êtes fiers de me recevoir. Ce n’est pas possible ailleurs. Amazon ne peut pas faire ça. »

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