Un Lucie Taïeb : P U N° 156 :

Freshkills est paru au Québec en 2019, puis à la Contre-allée et enfin chez Pocket. Lucie Taïeb est chercheuse en littérature, travaille la question de la mémoire. Mémoire de la dictature argentine, de la Shoah et, avec ce livre, de l’aboutissement de notre société de consommation : ses déchets. Fresh kills est le  nom d’une décharge à Staten Island, créée en 1948 pour trois ans, continuée jusqu’en 2001, après le 11 septembre. Freshkills est le nom qu’on donne au lieu maintenant que l’on veut en faire un parc, un lieu sain, agréable. Transformation du nom – minime certes, juste un écart enlevé –  mais efficace pour dissimuler l’histoire et la vraie composition du sol, pour faire croire à une « nature ».

Voilà quelques Poèmes Express issus de Freshkills :
Un beau jour. Le premier jour sur terre où le mot pensera.
– Le métro avance, ralentit, sort du réel et s’arrête.
– En haut du mont, la vue saute aux yeux, pas à l’esprit.
– Ce garçon déhanché torse nu, on a presque honte de le manger, presque.
– Elle égratigne, saigne la mort, sourire sur la face, mains sales.
– La main maintient la main d’oeuvre, la main à coudre, la main à cadence.
– Mosaïque, morceaux portant morsure, interstice, histoire de séparation.

Freshkills a été offert à Christian Girault, une des chevilles ouvrières de Pirouésie,  comédien, chanteur baroque. Cette année, il nous a entraînés dans Le bourgeois versifié, le Bourgeois gentilhomme « traduit » en alexandrins par l’oulipien Jacques Jouet. Un atelier de mise en voix qui s’achevait… en spectacle avec la chorale éphémère d’Emmanuelle Dubost. Et pour corser encore la chose, en présence de l’auteur…
Un moment joyeux en fait, et une tout autre manière de rencontrer des écrivants connus depuis des années en atelier d’écriture.

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