Dans la famille des

Dans la famille des « purs », je voudrais la « mère » : Jane Sautière
Les « purs », encore cette formulation grandiloquente !
Ouais…
Sans doute n’est-il pas vital qu’un écrivain soit bon humainement. On peut apprécier son écriture sans cela, et Céline en est une preuve. Mais, quand même, j’aurais tendance et la faiblesse de penser que la concordance des deux est un plus.

De Jane Sautière, j’ai d’abord lu Corps flottants, paru cette année – on en a parlé au Chat Bleu – . et viens de finir Fragmentation d’un lieu commun, chez le même éditeur, Verticales, son premier livre, de 2003
– parce que vous vous souvenez ? : la durée d’un livre n’est pas, ne peut pas être, de trois mois – .

Au même moment, un article de Libé nous rappelle que 74 000 personnes sont incarcérées en France (chiffres du 1er juillet 2023) et pointe un problème supplémentaire pour la réinsertion de ces gens : la dette qui court toujours à l’extérieur, les impayés qui s’accumulent.
Fragmentation d’un lieu commun, ce sont cent fragments adressés, cent « vous » ou « tu » à cent personnes croisées en prison, ou à l’extérieur, en tant qu’éducatrice. Cent personnes reconnues pour autre chose que leur dangerosité, leur délinquance, leur maladie mentale, ou leur inadaptation. Cent courts chapitres de visibilisation d’existences des deux côtés de la justice. Parce que quelques fragments évoquent aussi des collègues ou des surveillants. Cent mini-textes sans sensiblerie mais pleins de sensibilité. Cent approches de femme…
Je sais, c’est une autre délimitation risquée : écriture masculine ou féminine. Ce n’est d’ailleurs pas ce que je veux pointer. Il s’agit, non de l’écriture d’une femme, mais d’un écrit, d’empathie lisible, évidente. Et d’accord, tous les textes de femmes ne sont pas bourrés d’empathie. Et encore d’accord, empathie ne signifie pas qualité.

Mais voilà, pour finir, un tout petit extrait :  P. 100-101 :  » Votre fils va venir vous voir. Il ne travaille plus à l’école depuis que vous êtes détenu, ça vous soucie beaucoup. » (…) « Je sens qu’il faut que votre fils sache que c’est viril d’apprendre. C’est un combat, une lutte, aussi grasse et épaisse que la lutte à main nue. »

Une réflexion sur « Dans la famille des »

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