Les Vivants – février 2024 – 2)

Mis en avant

Normalement, on ne parle que bouquins
mais là, on a commencé avec les émotions ressenties devant le ballet Gravité d’A. Preljocaj que TOUT LE MONDE a trouvé fabuleux !

Puis, les romans ( d’auteurs venus, pour certains, au Goût des autres ou dans un « after » au CEM avec le DUT Métiers du livre) :
– Cécile Coulon : pour La langue des choses cachées, 2024, éditions L’iconoclaste : histoire d’un fils et sa mère dans un petit village enclavé d’Auvergne. Question de médecines parallèles, de tradition, de non-dits.
Cécile Coulon a livré sa « méthode de travail » : la course qui l’amène à un état hypnotique, l’écriture et, le lendemain, la relecture à voix haute pour entendre si cela va. Elle dit ne pas aimer les textes où tous les détails sont donnés. – Elle devrait aimer Eugene Marten (éditions Quidam) …-
– Thomas B. Reverdy : Le grand secours, 2023, Flammarion : un écrivain va dans le 93 dans une classe. Une émeute a lieu.
– François Bégaudeau : L’amour, 2023, éditions Verticales : l’histoire d’un couple dans sa banalité.
– Gaspard König : Humus, 2023, éditions de l’Observatoire. König est multiple : politique, écologiste, philosophe. Dans ce roman…sur les lombrics…, il montre l’évolution de deux étudiants en agronomie.
– Tiffany McDaniel : Betty, chez Gallmeister, en collection poche Totem, traduit par François Happe : entre Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur de Harper Lee et Là où chantent les écrevisses de Della Owens. Dans l’Ohio, une petite fille de père cherokee et mère blanche. « Très poétique »
– Marie Benedict : La femme qui en savait trop, en 10-18, traduit par Valérie Bourgeois. Une fiction à partir de la vie d’Hedi Lamarr, superbe actrice hollywoodienne, mais pas que !
Voilà pour les romans, maintenant les essais :
– Pierre Bayard : pour » l’ensemble de son oeuvre » de Il était deux fois Romain Gary (1990), à Hitchcock s’est trompé  (2023) en passant par Comment parler des livres que l’on n’a pas lus (2006). La plupart des livres de ce professeur de littérature et psychanalyste sont aux éditions de Minuit.
– Chantal Thomas : Comment supporter sa liberté, 1998, Rivages Poche : une réflexion sur l’importance du temps libre, le plaisir de dire non aux obligations.
– Yannick Haenel : Blue Bacon, 2024, dans la collection Une nuit au musée chez Stock. A Beaubourg, son rapport à Francis Bacon et son travail.
– Annette Wieviorka : Tombeaux – autobiographie de ma famille, 2022 au Seuil. Histoire de ces deux familles juives, avant et lors du nazisme.
De la même, en 2021, éditions Stock : Mes années chinoises. Autour de 1970, elle a, comme beaucoup d’intellectuels, été maoïste, et a vécu deux ans à Canton en tant que professeur.
– Anthony Grafton : Les origines tragiques de l’érudition – Une histoire de la note en bas de page, 1998 Seuil. Livre très sérieux qui m’ a fait me souvenir du roman de Nicholson Baker : La mezzanine où les notes en bas de page s’écoulent sur les pages suivantes et supplantent le texte de départ. Un livre très drôle.
On a aussi parlé d’ARPENTAGE, mais on y reviendra..

Prochaine rencontre prévue : jeudi 14 mars, à partir de 18h, aux VIVANTS.

 

Les Vivants – février 2024 – 1)

Mis en avant

Deuxième réunion d’Un vin, des livres aux Vivants, librairie, cave et bar à vins.
Sébastien nous proposait des vins de Loire :
en blanc, un cépage melon de bourgogne : un vin sec à gamme aromatique.
En rouge : un Anjou de St Georges du Layon. Un cépage cabernet franc et grolleau. Très fruité et léger. Ils ont accompagné :

– Le compromis de Sergueï Dovlatov, traduit par Christine Zeytounian-Belous, 2023, éd. La Baconnière. Sergueï Dovlatov, journaliste et auteur est né en 1941 en URSS et mort aux USA en 1990 où il avait émigré en 1978. Ses textes sont d’abord parus en samizdat, ne sont devenus livres qu’à New York. La Baconnière, maison d’édition romande, continue de les traduire.
Dans Le compromis, on a plusieurs récits de « compromis » en tant que journaliste en Estonie, alors colonie russe. C’est plein d’alcool, d’impertinence  et d’humour. Complètement irrévérencieux vis-à-vis du pouvoir, ce qui a entraîné cette invisibilisation de ses romans.
Que s’est-il passé ? d‘Hanif Kureishi, 2023, éditions Christian Bourgois, nouvelles et essais traduits par Florence Cabaret. Ces articles et petites fictions nous donnent à relire l’auteur du Bouddha de banlieue, et aussi scénariste de films de Stephen Frears des années 80 : My beautiful laundrette, Sammy et Rosie s’envoient en l’air. Son métissage (père pakistanais, mère anglaise) lui a fait vivre et montrer l’Angleterre de manière différente d’un Martin Amis, d’un David Lodge ou d’un Ian McEwan.
Là, il est question, entre autres, de la place de la nouvelle génération d’auteurs anglophones venus d’ex-colonies dans l’édition britannique contemporaine, mais aussi d’amis : Bowie, Rushdie…
– Odyssée des filles de l’Est d‘Elitza Gueorguieva, 2024, éd. Verticales : le deuxième livre de cette auteure née en Bulgarie, venue étudier en France, documentariste et écrivaine pleine d’humour. Son premier livre Les cosmonautes ne font que passer est maintenant trouvable en Folio.
C’est franchement drôle et pourtant parle de faits qui ne le sont pas : l’immigration, la relation à une autre langue, la confrontation avec une administration tatillonne et ses fonctionnaires rogues – pléonasme ? -, la prostitution et un moment de l’histoire du XXème siècle de la Bulgarie.

Prochaine réunion prévue le jeudi 14 mars

 

 

Les Vivants -2)

Mis en avant

Aux Vivants, on a évoqué :
– Ceux qui appartiennent au jour d‘ Emma Doude Van Troostwijk que plusieurs d’entre nous connaissent puisqu’elle a fait le master de création littéraire du Havre et a proposé des ateliers d’écriture d’une part et des scènes ouvertes, chez Lili, d’autre part. Emma a à peine 24 ans et son premier livre vient de paraître aux éditions de Minuit. Nous sommes dans une famille de pasteurs. Les mots importent et Emma Doude les prend dans ses deux langues, le français et le néerlandais. Certaines expressions sont traduites de l’une à l’autre langue, montrant toute la poésie de chacune. D’autres restent dans leur originalité, blocs de sons, beaux en eux-mêmes.
Elle, comme Emmanuelle Tornero, autre ex-étudiante du master, qui voit sortir son premier roman, Une femme entre dans le champ, chez Zoé (janvier 2024), travaillent par petits paragraphes. Chez Emmanuelle Tornero, il est question d’une femme devenue mère.
Toutes deux, invitées au festival Le goût des autres, hier soir, lisaient des extraits de leurs textes à la médiathèque Oscar Niemeyer. Elles ont par ailleurs déjà eu droit à une belle couverture critique : une émission chez Marie Richeux, sur France Culture, un article dans Le Monde, dans Télérama, dans En attendant Nadeau….
Mais il n’y a pas que les livres tout juste sortis :
des rééditions viennent redonner vie à des auteurs injustement oubliés : Bernard Clavel : L’Espagnol. Sorti en 1959, Albin Michel le fait reparaître. Pendant la 2nde guerre mondiale, un Espagnol arrive dans le Jura. « Un très beau personnage, de très belles descriptions de la terre, des paysages » dit V.
Et puis d’autres :
– La comtesse de Ricotta de Milena Agus, éditions Liana Levi, traduit par Françoise Brun. Nous sommes à Cagliari où vivent trois soeurs. Leur famille a été riche, ce n’est plus le cas. Elles vivent bien dans un palazzo, mais délabré. Elles sont très différentes. Le livre est léger, les personnages pleins de fantaisie.
– Les trois lumières de Claire Keegan, traduit en 2011 par Jacqueline Odin pour Sabine Wespieser. M.H l’a lu en anglais Son titre est alors Foster. « De belles descriptions de la nature. Frais, doux. »
– Corps et âmes de Frank Conroy, chez Gallimard puis en Folio, traduction de Nadia Akrouf. Le personnage EST la musique.

En essais, il a été question de trois ouvrages que l’on peut lire comme des dictionnaires, par articles, au gré de ses envies :
–  Courir, méditations physiques du philosophe Guillaume Le Blanc, en collection Champ Flammarion, 2012.
– Sur les routes du jazz d’André Manoukian, Harper Collins poche 2023 : on peut y apprendre par exemple le lien entre le quadrille et le jazz.
– Mères-filles une relation à trois de Catherine Eliatcheff et Nathalie Heinich, en livre de poche ( 2003 ) : un essai sociologique en sept parties qui prend ses exemples dans le cinéma et la littérature.
Enfin, Les ingénieurs du chaos de Giuliano da Empoli, trouvable en Folio. Une analyse de la politique et Internet. Comment elle est fagocitée par les trolls, les réseaux sociaux, comment on se sert des ressentiments.

L’un d’entre nous a, à la suite de cela, parlé de la situation actuelle dans l’Argentine de Milei où les deux ministères, de la culture et de la femme, ont disparu.
Une autre a mis cela en parallèle avec l’essai de Sofi Oksanen, super documenté et effrayant, éditions Stock 2023. Mais on y reviendra sans doute ; ce livre est trop important.

Prochaine réunion à Les Vivants prévue le jeudi 22 février à 18 h

Les Vivants – 1)

Nous étions à Les Vivants, un joli endroit, 64 rue Paul Doumer au Havre, pour la première fois hier, et c’était très très sympathique !

Sébastien nous a présenté la philosophie du lieu :
Les Vivants, c’est une librairie, une cave et un bar à vins, et c’est ouvert depuis mi-septembre 2023.
– Le côté livres est spécialisé dans
des essais sur l’écologie au sens large, la question sociale, le féminisme (NON, ce n’est pas un gros mot). et
en fiction , la littérature européenne, nordique, israélienne avec de très bonnes maisons d’édition indépendante moins médiatisées mais tout aussi intéressantes. Exemple : Le Typhon, installées à Marseille, hyper travaillées autant au niveau de la qualité des textes que de leur esthétique.
– la cave à vins : des vins naturels, des vins en bio-dynamie avec des vignerons qui travaillent souvent aussi d’autres produits que la vigne, avec des méthodes ancestrales, très peu de sulfites ajoutés.

Pour cette première fois d’Un vin, des livres dans son lieu, Sébastien nous a proposé des vins de Gaillac, dans le Tarn. En blanc, un cépage mauzac, très fruité, et léger. En rouge, un vin tout aussi léger (12°) et très travaillé dans le fruit. Ils étaient accompagnés de produits venant de deux magasins de la même rue : l’épicerie italienne et le fromager.

On vous parle des livres évoqués dans un prochain post.

chat bleu – décembre 2023 – 3) et en cadeau, une pincée de Vialatte

La pincée de Vialatte  :

« Chronique de l’arbre de Noël
L’esprit de Noël est un esprit joyeux qui devient plus riant par temps de neige. Il porte un capuchon pointu (doublé de lapin) et se juche sur les abiétinées. C’est pourquoi le vrai père de famille va cueillir un sapin la veille de Noël. A Paris il l’achète au mètre. A Düsseldorf il le vole dans un square. (C’est ce qui a amené les jardiniers municipaux, en Rhénanie, à enduire tous leurs résineux d’une drogue qui devient lacrymogène à la température moyenne d’une salle à manger germanique. Ce qui est gênant au moment des joyeuses plaisanteries.) Une fois que le sapin est planté, l’homme y pend des polichinelles. En satin rose. Des boules brillantes. Des bougies bleues. Des cadeaux pour les invités. Ficelés avec des ficelles d’or. Des dragées, des boîtes de sardines, tout ce qu’il y a de plus luisant et de plus avantageux, souvent même de plus comestible : les gros créanciers de la famille, des harengs saurs, de grandes bouteilles de vin mousseux, et des perroquets portugais, en laine tricotée, rouges et mauves, pour mettre sur la théière et garder le thé bien chaud. Des champignons vénéneux à tête rouge, des amanites vireuses, des amanites panthère, des amanites tue-mouches ; en bois ; avec une pince pour tenir au rameau. Des pères Noël qui ont une barbe en coton, moitié moujiks, moitié poivrots. Des paillassons pour cage à poules (c’est une invention toute récente : la poule s’essuie les pieds avant d’aller au lit). Les enfants sont ravis, les invités s’exclament. Quelquefois un grand-père se dévoue pour faire des grimaces difficiles. On distribue des marrons glacés.
La Montagne, 25 décembre 1962″
on finit l’année avec plus d’essais ou de non-fictions que de romans :
– Et Zeus créa la fêta éditions La Martinière, 2023 : 54 (vraies) recettes de Grèce
– Ripostes – archives de luttes et d’actions 1970-1974, sous la direction de Philippe Artières, éditions du CNRS, 2023
– Méfiez-vous des femmes qui marchent d’Annabel Abbs, 2021, traduit par Beatrice Vierne, éditions Arthaud. Des peintres, des écrivaines
Art de marcher de Rebecca Solnit, traduit par Cristelle Bonis, 2022, éditions de l’Olivier.
– L’heure des femmes d’Adèle Bréau, éditions Jean-Claude Lattès, 2023 : sur Ménie Grégoire qui a osé parler, dès 1967, des femmes sans tabou à la radio
– Proust, roman familial  de Laure Murat, éditions Robert Laffont, 2023. Prix Médicis essai. Elle y parle de son milieu d’origine, milieu de formes et d’apparences, sans vrai savoir. Elle reconnaît sa famille dans La recherche… Proust l’a aidée à comprendre comment fonctionne ce monde.
– Sia , éditions L’Harmattan : témoignage : un homme et une femme, Ces Guinéens de deux ethnies et religions différentes ont fui leur pays pour vivre ensemble en Normandie.
– Promenade en hiver de Henry-David Thoreau, éditions Le mot et le reste, 2018. Traduction de Nicole Mallet : un texte de 1888, une journée d’errance dans la neige. Enormément de précisions dans les descriptions.
– Correspondance Matisse – Marquet 1898-1947, La Bibliothèque des Arts, 2008.
Quand même quelques fictions :
– Les ciels furieux d’Angélique Villeneuve, 2023, éditions Le Passage. La vie d’une famille juive en Europe de l’Est au début du XX ème siècle vue à travers une petite fille.
– Sarah, Suzanne et l’écrivain d’Eric Reinhardt, 2023, Gallimard : deux histoires de femmes de deux milieux différents. « Bluffant, vraiment brillant ! » dit F.B.
– Rendez-vous à Parme de Michèle Lesbre, une balade pleine de références théâtrales et littéraires : Chéreau, Duras, Handke. Trouvable en Folio.
– Les enfants sont rois de Delphine de Vigan, 2021, Gallimard : une influenceuse met en scène ses enfants. Ce qui s’en suit.
Et rappelez-vous :
nous continuerons de lire et de parler de livres mais plus au Chat Bleu.
Le nouveau lieu de réunions sera Les vivants.
Au 18 janvier, 18heures !

Chat Bleu : décembre 2023 – 2)

Nous buvions, en rouge, un Saint-Nicolas de Bourgueil, ou, en blanc, un Pinot gis d’Alsace.
Ils accompagnaient :
– La sentence de Louise Erdrich, paru aux USA en 2021 et en 2023 chez Albin Michel, collection Terres d’Amérique, traduit par Sarah Gurcel. Prix Fémina Etranger. Un mélange de roman et de faits : la plupart des scènes se passent dans une librairie indépendante qui existe et est celle de l’auteure depuis plus de vingt ans : Birchbanks Books à Minneapolis. Ce livre donne plein de pistes de lectures, des textes d’écrivains américains que nous connaissons mal, d’origine amérindienne ou afro-américains.
Le livre rend aussi compte de l’affaire George Floyd et de la Covid.
– Chant balnéaire d’Oliver Rohe, éditions Allia, 2023 : vingt ans après Défaut d’origine, la guerre du Liban vue par Rohe.
Il a alors 17 ans ; son père n’est plus là ; il vit avec sa mère et sa soeur à l’extérieur de Beyrouth, dans une station balnéaire, été comme hiver. La situation est complexe, les bombes tombent, l’argent manque, les copains et les filles sont plus importants que l’école.
Le livre vient de recevoir le prix France-Liban 2023.
– Le nouveau de Keigo Higashino, 2013, Tokyo, 2021, Actes Sud. Traduction de Sophie Refle. Cet auteur né en 1958 a plus de 60 romans à son actif. Le rythme est lent. Ce polar est plein de dialogues. Le lecteur avance à l’aveugle. Il n’y a aucune violence. Certes, un crime a eu lieu mais ensuite, à coups de chapitres qui semblent indépendants, l’inspecteur Kaga passe de commerce en commerce dans un quartier traditionnel de la capitale où il vient d’arriver et trouve ainsi le coupable.

La suite, bientôt…

Chat Bleu – décembre 2023 – 1)

Hier soir était notre dernier Chat Bleu.
N’senga nous a super bien accueillis pendant de nombreuses années.
Il arrête son activité dans ce lieu. Il la poursuivra en tant que traiteur
avec ses « Charavanes » pour des événements publics, ou privés.
Nous allons continuer Un vin, des livres, mais ailleurs et sous un autre nom.
Ailleurs = au 64 rue Paul Doumer, Le Havre,
dans un nouvel espace de vins natures et littérature : Les Vivants.
Notre première rencontre dans ce nouvel espace est programmée le jeudi 18 janvier, à 18h

Mais, avant le 18 janvier, bientôt, promis, vous pourrez voir ici les livres dont il a été question hier.

 

Chat Bleu – novembre 2023 – 2)

Et puis :
des romans étrangers :
La cité de la victoire de Salman Rushdie, Actes Sud. Traduction de Gérard Meudal : entre la fable et la fiction historique. L’enchaînement des royautés du XIV ème au XVI ème siècle. Une jeune femme se voit donner un pouvoir par une déesse : vivre 247 ans.
Certaines lectrices ont parlé de « froideur ». D’autres ont défendu l’auteur (si tant est qu’il ait besoin d’être défendu.) : « il parle du pouvoir des mots, de la littérature ». J’avais adoré le premier livre de lui paru en France en 1983, chez Stock, traduit par Jean Guiloineau., Les enfants de minuit. Un livre sur la partition Inde/Pakistan de la place d’un petit garçon.
Pachinko , de Min Jin Lee, éditions Harper Collins, 2021. Traduit par Laura Bourgeois : une saga familiale de 1930 à 1990. Il y est question des relations japono-coréennes, des sacrifices que font les immigrés.
Les graciées de Kiran Millwood Hargrave, (R U), traduit par Sarah Tardy, 2020, éditions Robert Laffont : On est en 1617 au nord du cercle polaire, un pasteur arrive et combat la sorcellerie. Basé sur des faits réels arrivés à Vardo.
La petite fille deBernard Schlink, 2023, Gallimard. Traduit par Bernard Lortholary : C. l’a « adoré » : Un libraire retrouve sa pseudo petite fille du côté Est de l’Allemagne reconstituée. Il tombe dans un milieu d’extrême-droite, essaie de l’ouvrir à une autre vision.
Découverte inopinée d’un vrai métier de Stefan Zweig, en Folio. « deux nouvelles, courtes, étonnantes, à découvrir » dit M.F.
Un roman historique français : Mes pas dans leurs ombres de Lionel Duroy, éditions Mialet Barrault, 2023 : les pogroms qui se sont passés en Roumanie et ont été niés.
Une collection Le goût de… aux éditions Mercure. 310 petits volumes, chacun sur un thème : une ville, un auteur, une saison, un sentiment … à travers des extraits de textes littéraires. Se met dans la poche, ouvre des horizons.
Un texte couvert de prix, et … interdit dans une école catholique bretonne… :  Triste tigre, de Neige Sinno, chez POL, 2023 : le thème de l’inceste, « abordé sans voyeurisme, sans pathos. » « Beaucoup de références, très intellectuel ».
Croire – sur les pouvoirs de la littérature,
de Justine Augier, 2023, Actes Sud : sur la fin de vie de sa mère pendant le confinement

Chat Bleu – novembre 2023 – 1)

Avec un verre de Bourgogne :
en blanc, une Haute-côte de Beaune, cépage Chardonnay, sec, minéral
ou
en rouge, un Pinot noir, charnu, présent en bouche,
tous les deux vieillis en fût de chêne
nous avons parlé de :
– C’est bien écrit ! d’Andreï Siniavski, aux éditions du Typhon, 2023. Avec une préface de Iegor Gran qui, il y a quelques années, a écrit Les services compétents (éditions P O L), le récit romancé et très drôle des difficultés qu’ont eues les services secrets pour arrêter son père. Siniavski (1925-1997) a fait 6 ans de camp pour « agitation antisoviétique ».
Ce volume contient deux novellas : Graphomanie et Le verglas, écrites en 196O, 6 ans avant cette arrestation..
Dans la première, les personnages ne lisent pas, écrivent tous, mais ne sont pas publiés.  P. 29 : « je suis né pour la poésie »… »on est tous nés pour ça ! Un penchant naturel pour les belles lettres ! Sais-tu à qui on le doit ? A la censure ! Oui, c’est elle, notre chère, notre tendre petite mère, qui a pris soin de nous tous. A l’étranger, c’est plus simple, plus impitoyable. Un lord quelconque publie un livre de vers libres, tout de suite on voit que c’est de la merde. Alors personne ne le lit, personne ne l’achète »(…) »tandis que nous, nous passons notre vie dans une agréable ignorance, à nous flatter d’espoir…C’est merveilleux ! L’Etat lui-même, que le diable l’emporte, te donne le droit – un droit précieux – de te prendre pour un génie méconnu. »
Dans la deuxième histoire, le narrateur, tout à coup, se trouve en capacité de voir et le passé,  vies antérieures comprises, et le futur des personnes qu’il croise.
On est loin là du « réalisme soviétique ».
L’humour et le fantastique  pouvaient vous envoyer en camp en U R S S …
Par ailleurs, remarquez l’esthétique de la première de couv’ !
– Troubler les eaux de Frédéric Lavoie, La Peuplade éditions, 2023. Ce journaliste canadien, vivant et à Montreal et à Bombay, écrit là un essai à partir de son expérience au Bangladesh avec des fixeurs. Il se pose des questions déontologiques : comment rendre compte, comment pratiquer le journalisme dans un pays pauvre, avec des interlocuteurs de classe sociale et de culture différentes des vôtres.
.- MURmur de Caroline Deyns, éditions Quidam, 2023 : roman en deux parties.
Une première sans pagination, un texte en colonne étroite, centrée où celle qui écrit dit « je » et parle de son emprisonnement pour avoir perdu son bébé du fait d’une fausse couche.
La deuxième partie reprend la forme habituelle et raconte l’histoire de « GrandeEnfant » que « Garçon » a forcée. Elle a attendu un enfant et a avorté avec l’aide de sa mère et d’une autre femme.
Et là, nous sommes dans une histoire vraie : celle du procès de Bobigny dans lequel Gisèle Halimi est intervenue.
Roman, certes mais basé sur des faits réels, sur le constat que les femmes, auparavant ou maintenant, dans maints pays, n’ont pas de droit sur leur propre corps.

La suite du Chat Bleu de novembre bientôt…
Le prochain Chat Bleu devrait avoir lieu jeudi 14 décembre.

 

Keun, Dagognet et Gran :

Les éditions du Typhon ont, en 2021, sorti Une vie étincelante, et, en 2023, à l’occasion de la création de leur jolie collection de poche « Soleils noirs », ressorti ce texte d’Irmgard Keun. Cette autrice allemande (1905-1982), avant l’arrivée des nazis au pouvoir, avait connu un grand succès pour ce livre. Féministe dans un temps qui l’était peu, elle parle là d’une jeune femme libre, vivant son corps un peu à la manière des hommes. Les nazis ont censuré ce livre. Elle s’est exilée, a publié en 1937, grâce à des éditions allemandes installées aux Pays-Bas, puis en 1939 en France Après minuit, un livre éminemment politique qui dit énormément sur le nazisme au moment même où il sévit.
Il est super de retrouver des auteur(e)s qui ont marqué leur temps et peuvent nous le faire comprendre. Il est super de retrouver des auteur(es) oublié(e)s.

Fraternité de Luc Dagognet est un premier roman paru aux éditions Do en 2023. Il m’a, au départ, fait penser à Luc Chomarat quand il est bon. Le personnage principal travaille dans la pub. Le point de départ est le bruit qui le gêne et fait monter entre un voisin et lui, pourtant pas très courageux, une « guerre ». Plus loin on est à la limite du fantastique, dans les catacombes et des jeux vidéo. Dagognet a des formules humoristiques qui vont bien avec l’humour de son éditeur. Exemple : une définition des stimuli : « notre coup de marteau sur le tendon rotulien de votre opinion »

Voyage clandestin avec deux femmes bavardes de Iegor Gran, éditions P O L, paru en 2023, traite de l' »opération spéciale » en Ukraine à travers les comptes Twitter – normalement interdits – de deux femmes russes. Des femmes qui existent. On est dans une sorte de document. Grâce à ces réseaux sociaux, on peut avoir une idée des différences à l’intérieur de l’opinion publique en Russie. L’une est totalement pro-Poutine, » le réunificateur des terres russes », l’autre pas et doit faire attention à ce qu’elle dit dans son quotidien et à ce qu’elle poste.
Iegor Gran, fils du dissident Andreï Siniavski, et auteur du merveilleusement drôle Les services compétents a, dès le début de cette guerre, pris position avec Z comme Zombie contre son horreur.